Cultures d'Yvelines

Madame Elisabeth, portrait d’une princesse singulière

Département des Yvelines

Je suis dernière-née de la fratrie d’un grand roi. Orpheline à 3 ans, je trouve refuge auprès de lui, qui m’offre à l’âge de 19 ans, un superbe domaine à Versailles, dernière résidence princière encore conservée dans son ensemble. Je fête aujourd’hui mes 257 ans, je suis, je suis, je suis… Élisabeth de France, dite Madame Élisabeth, soeur de Louis XVI ! Portrait d’une princesse singulière au destin tragique.

Orpheline royale

C’est le 3 mai 1764 que je vois le jour à Versailles. Je suis tout de suite baptisée dans la Chapelle Royale de Versailles, en présence de mon grand-père le roi Louis XV de France et de ma grand-mère, la reine Marie Lesczynska.

Malheureusement, mon père, le dauphin Louis Ferdinand, meurt de tuberculose l’année suivante, et ma mère, la dauphine Marie-Josèphe de Saxe, deux ans plus tard. Je n’ai alors que 3 ans, et mon frère aîné, le futur Louis XVI, seulement 13 ans.

Une éducation princière

Confiée avec ma sœur Clotilde, de 6 ans mon aînée, aux soins de la comtesse de Marsan, je reçois une excellente éducation au cours de laquelle je me distingue par mes talents en mathématiques et en sciences. Mes contemporains me disent bonne écuyère, douée pour le dessin et la broderie, mais piètre chanteuse. Dès l’enfance, je révèle une personnalité ambigüe, ma grande dévotion s’accordant à un caractère dissipé et original (je signe certaines de mes lettres « Élisabeth la Folle »).

Je n’ai que six ans lorsque mon frère Louis-Auguste, devenu dauphin, épouse l’archiduchesse d’Autriche Marie-Antoinette, et 11 ans quand il est sacré roi. La même année, j’assiste avec peine au départ pour Turin de ma sœur Clotilde, désormais mariée au Prince de Piémont.

Sœur du roi

Je manifeste très tôt un fort attachement à Louis XVI et à Marie-Antoinette, aux côtés desquels je demeurerai toute ma vie.

Pressentie en 1777 pour épouser le frère de Marie-Antoinette, l’empereur Joseph II, deux fois veuf, sans enfant, et de 23 ans mon aîné, je refuse et obtiens de Louis XVI de pouvoir rester à Versailles.

Faute de prince, mon frère le roi me propose la charge de coadjutrice de la prestigieuse abbaye de Remiremont en succession de notre tante Christine de Saxe, mais je refuse aussi de devenir abbesse, préférant les joies de la Cour.

La tourmente

En 1789, j’ai 25 ans et la Révolution éclate. J’aurais pu choisir l’exil comme mes tantes et autres frères, mais je suis bien trop attachée à mon Louis XVI et sa famille, que je rejoins au Palais des Tuileries à Paris. Nous serons finalement tous emprisonnés et le 10 mai 1794, je serai guillotinée à Paris, au lendemain de mes 30 ans…

Mon Domaine…

Ahhh, mon beau Domaine… J’ai 19 ans en 1783 quand mon frère Louis XVI me fait cadeau d’un sublime domaine (aujourd’hui Domaine de Madame Elisabeth) doté d’une demeure et d’un parc, dans l’ancien village de Montreuil, à quelques centaines de mètres du Château de Versailles. Bien que n’étant pas autorisée à y dormir avant ma majorité (vingt-cinq ans à l’époque), je m’y rend tous les jours à cheval depuis le château de Versailles. La vie que j’y mène, plus simple qu’à la Cour, est rythmée par les loisirs auxquels j’ai pris goût dans mon enfance, ainsi que par mes actes de piété et mes bonnes œuvres, qui me valent le surnom de « Bonne dame de Montreuil ».

…aujourd’hui lieu familial et écologique

Malmené à travers les décennies, le Domaine de Madame Elisabeth est passé de main en main. C’est Madame de Montesquieu qui, au 19e siècle, a à cœur de réhabiliter le domaine et lui rendre sa grandeur. En 2019, et c’est une chance, le Domaine de Madame Elisabeth est la dernière résidence princière, à Versailles, qui ait pu être conservée dans son ensemble. Le domaine a été un hôpital, mais aussi une manufacture d’horlogerie.

C’est en 1983 que le Département des Yvelines fait l’acquisition de ce Domaine. Dès 1994, le Domaine est ouvert au public et les yvelinois peuvent alors profiter de ce cadre unique à Versailles. Dissociée lors de la Révolution, l’Orangerie est réintégrée au Domaine en 1997. 

J’ai pu suivre que de vos jours, le Domaine, entretenu par le service des Espaces Verts, est devenu un lieu de culture, d’échange et de convivialité, et accueille des visiteurs toute l’année. Je suis ravie qu’aujourd’hui, le site et son histoire vivent encore, grâce à de nombreux évènements qui y sont organisés, comme le Comptoir de Noël, Les Yvelines font leur cinéma, ou encore des expositions à l’Orangerie ! Alors faites-moi confiance, allez-y faire un tour !